lundi 8 mars 2010

L’avenir du JT

Le français dans le monde, n°359
Sept-octobre 2008

Alors qu’il fêtera l’année prochaine ses soixante ans d’existence le journal télévisé, genre télévisuel particulièrement stable, semble montrer des signes d’essoufflement.

Une formule stable

Né en 1949, le journal télévisé a connu différentes évolutions. Très proche des actualités filmées qui ont continué à le concurrencer dans les salles de cinéma durant les premières années de son existence, il leur empruntait beaucoup à ses débuts. Il n’y avait pas à l’époque de présentateur et le journal était une mise bout à bout de reportages assez hétéroclites. Au milieu des années 50, le présentateur fait son apparition et le JT cherche un équilibre entre la présentation de l’information et son illustration par l’image. Cette question restera d’ailleurs centrale dans la conception de tout JT. Au début des années 60, la formule qui continue à prévaloir aujourd’hui sur les grandes chaînes généralistes, s’impose. Le présentateur est désormais maître du dispositif, lance les reportages et met en relation les différentes interventions des journalistes ou des invités. Depuis cette époque, les formules ont relativement peu changé. On est certes passé d’une télévision plutôt marquée par l’enquête, le direct, le terrain à une télévision plus centrée sur l’examen et donc le studio et les commentaires. Les styles de présentation ont eux aussi pu changer, les présentateurs personnalisant plus ou moins leur présentation. Si ces paramètres restent intéressants pour comparer les journaux télévisés dans un même pays et entre pays, il reste que la formule du JT est relativement stable et même assez universelle.

Un nouvel environnement médiatique

Depuis quelque temps pourtant les Jt des grandes chaînes (TF1, France 2) semblent présenter des signes d’essoufflement. Les chifffres d’audience ne sont pas bons, le public est vieillissant et les critiques virulentes. Les JT sont accusés de ne plus être que des robinets d’informations (Télérama, 30 janvier 2008) et de favoriser des sujets spectaculaires qui sollicitent surtout l’émotion (Dossier Télérama mai 2008). La crise que traversent les JT doit bien sûr être référée au nouvel environnement médiatique dans lequel ils se trouvent. Celui de la télévision tout d’abord qui a beaucoup changé avec l’arrivée en 2005 de la TNT (Télévision numérique terrestre. Voir FDLM 340, juillet 2005). Des chaînes d’information en continu comme BFM et iTélé ont fait leur apparition dans les foyers en proposant de nouvelles formules de JT plus courts, d’un rythme plus enlevé et souvent précédés et suivis de courts débats (iTélé) au ton vif et libre. C’est ensuite la présence d’Internet qu’il faut prendre en considération. Le réseau rend en effet possible l’accés à l’information à tout moment et en tout lieu . Des enquêtes montrent par exemple que de plus en plus de gens consultent des sites d’information (journaux, télévisions, portails généralistes) au travail. Très informés durant la journée, ils n’attendent plus de la même façon ce grand rendez vous du soir que constituait le JT. Cela semble particulièrement vrai chez les jeunes qui désertent le petit écran à ce moment de la journée.

Un nouveau défi

Si l’on regarde ce qui s’est passé du côté de l’histoire des médias, on peut pourtant constater que jamais un média n’a supprimé celui qui l’a précédé. Le JT qui s’ancre dans une histoire médiatique et culturelle complètement différente de celle d’Internet devrait donc survivre à condition qu’il sache repenser son rôle et ses contenus. Concurrencé par d’autres supports d’information, il devrait à la fois proposer plus de réflexion, d’analyse mais aussi envisager de manière nouvelle ses modes de rapport aux images.

Thierry Lancien