lundi 8 mars 2010

Les observatoires des médias

Le Français dans le Monde
n° 348, Janvier 2007


Si la critique des médias n’est pas nouvelle et la méfiance à leur endroit presque consubstantielle à leur naissance, le phénomène des observatoires des médias est plus récent.
De ces lieux d’observation, il ne s’agit pas de juger et de condamner mais plutôt d’analyser les processus de fabrication de l’information.
La télévision, premier média en terme de fréquentation, occupe évidemment une place importante dans ces dispositifs.

Le développement des observatoires des médias est à mettre en rapport avec l’exigence de plus en plus grande des citoyens vis à vis de l’information et du travail des journalistes. L’essor de l’éducation aux médias dès le colllège ainsi que la présence de départements de sciences de l’information et de la communication dans les universités expliquent aussi cette sorte de droit de regard que les citoyens souhaitent exercer sur les médias. Le fait qu’Internet permette un rapport plus diversifié avec les médias vient sans doute encore renforcer le sentiment critique des lecteurs, auditeurs et téléspectateurs.
D’autre part l’arrivée récente au quotidien Le Monde ou sur certaines chaînes de télévision (comme à France Télévision) de médiateurs vers lesquels les lecteurs et/ou les téléspectateurs peuvent diriger leurs observations critiques est à rapprocher de ce qui vient d’être évoqué.
Dans un entretien récent accordé à la revue Médiamorphoses (Médiamorphoses n°18, septembre 2006), le sociologue des médias Jean-Marie Charon fait aussi observer que la mise en cause des médias par les citoyens : « intervient à un moment où les journalistes (et les rédactions) apparaissent souvent désemparés, en tout cas ayant toujours plus de difficultés à situer et maîtriser leur responsabilité vis à vis de l’information ». Il souligne d’ailleurs que « cela n’a rien d’étonnant dans une période dominée par la transformation rapide et incessante des techniques et des structures ; l’accélération (direct, live, en continu…) et l’élargissement (des domaines abordés) du traitement de l’information ; le renforcement du poids des logiques économiques, de plus en plus financières, qui président à l’orientation des entreprises de médias ».

Qui observe et comment ?

Dans un tel contexte, le travail des observatoires consiste principalement à vérifier l’exactitude proprement factuelle des informations publiées (ce qui met en jeu l’honnêteté ou la compétence du journaliste), mais aussi à observer la sélection des informations et plus fondamentalement encore leur hiérarchisation puis leurs modes de traitement écrits et visuels.
A cet égard, on peut se demander à qui revient la légitimité permettant de porter ce type de regard sur les médias. La pratique journalistique est en effet régie par une charte des journalistes (Charte de 1918) et ceux-ci considèrent souvent que c’est à eux de contrôler la qualité de l’information selon les termes de cette charte. Beaucoup d’acteurs du champ médiatique sont pourtant d’accord pour considérer comme Pattrick Pépin, médiateur de Radio France qu’un : « observatoire des médias utile et crédible ne peut tirer sa légitimité que d’une participation croisée de trois composantes : le journaliste, le citoyen et l’expert ».

De l’entretien à une critique plus virulente

Dans le paysage médiatique français, il existe aujourd’hui trois observatoires qui sont présents sur Internet. Leurs sites offrent de nombreuses ressources concernant les médias et plus particulièrement la télévision.
Les « Entretiens de l’information » (http://entretiens.info) pluralistes, cherchent à favoriser débats et réflexions entre journalistes et représentants de la société civile. Ayant des antennes en province, l’observatoire organise toutes sortes de manifestations.
« L’observatoire des médias » (www.observatoire-medias.info), créé en 2003 dans la mouvance altermondialiste , est plus militant et prétend défendre l’information comme bien public.
Enfin Acrimed (Action-critique-médias), (www.acrimed.org) propose une orientation nettement plus critique et virulente des médias appuyés sur des études d’émissions, s’articles.

Thierry Lancien